Interview du docteur Richard Eba’a Atyi, « le CIFOR a déjà 20 ans “

Dr Richard Eba'a Atyi. Coordonnateur régional Afrique centrale du CIFOR.

Dr Richard Eba’a Atyi. Coordonnateur régional Afrique centrale du CIFOR.

COBAM News : Le CIFOR vient de célébrer son 20ième anniversaire sous le thème « gestion durable des forêts en Afrique centrale : Hier, Aujourd’hui, et Demain ». Quelles sont les principales réalisations du CIFOR en Afrique centrale durant ces 20 dernières années ?

REA : Comme principales réalisations en Afrique centrale, nous pouvons citer entre autres la contribution du CIFOR à l’amélioration de la gestion des concessions forestières, à travers les normes de gestions forestières. Grâce à ces normes, nous avons actuellement en Afrique centrale des plans d’aménagements bien élaborés. Nous avons aussi la certification forestière, qui s’appuie sur des normes qui ont été élaborées avec la contribution du CIFOR.

Sur le plan politique, le CIFOR est le premier centre à avoir élaboré des directives pour la gestion durable des produits forestiers non ligneux. Il a ensuite été rejoint par des partenaires tels que la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) et la COMIFAC (Commission des forêts d’Afrique centrale), qui ont adopté ces normes. Rappelons que ces normes sont appliquées par les dix pays de la COMIFAC. A titre d’exemple, le Cameroun et le Gabon ont déjà dans leurs administrations, des directions ou sous-directions qui s’occupent de la gestion des produits forestiers non ligneux. Toujours sur le plan politique, les pays comme la RCA et le RDC ont utilisé les travaux du CIFOR pour élaborer leurs plans nationaux d’adaptation au changement climatique. Arriver à influencer l’organisation des pays est une étape très importante pour le CIFOR.

Comme réalisation sur le plan de la gouvernance, nous pouvons citer l’accord de partenariat volontaire APV de FLEGT (Forest Law Enforcement, Governance and Trade). Le CIFOR a travaillé ces dernières années sur le marché domestique du bois et contribué à attirer l’attention de l’Union européenne et des pays de l’Afrique centrale, sur l’importance des marchés domestiques qui ont maintenant une grande place à l’intérieur des APV FLEGT et doivent faire l’objet de suivis par l’administration des pays.

Nous avons aussi des résultats des recherches ponctuelles qui sont intégrés de manière sporadique. Voilà brièvement les grandes réalisations du CIFOR ces dernières années.

COBAM News : Que peut-on retenir globalement de cette conférence ?

REA : La conférence qui qui s’est déroulée à l’hôtel Hilton de Yaoundé du 22 au 23 mai dernier, a été l’occasion d’instituer un dialogue, entre la prise de décision politique et la recherche, comme le montre la déclaration. Ce dialogue était nécessaire, pour que les décisions politiques soient prises sur la base des résultats des recherches. Réussir à réunir des décideurs politiques, les Ministres, les grandes institutions telles que, la Banque mondiale, la FAO et des chercheurs de renommée nationale et internationale est une grande avancé en matière de gestion forestière en Afrique. Nous espérons que les résultats des recherches et les accords de cette conférence seront bientôt appliqués.

COBAM News : CIFOR CARO est le plus grand bureau régional du CIFOR. A quoi tient sa grandeur ?

REA : Il faut rappeler que le CIFOR n’est pas très grand. De manière générale, nous avons environ 200 personnes travaillant au siège, à Bogor(en Indonésie). Ici au bureau régional d’Afrique centrale, nous comptons 50 personnes et chaque année plus de 50 à 100 stagiaires et consultants. Elles constituent d’une certaine manière la plus grande représentation à l’extérieur du CIFOR dans le monde. Mais je ne pense pas que le potentiel humain soit à l’origine de la renommée du centre. A mon humble avis, les recherches du CIFOR ont contribué à forger la renommée du centre. Dès son installation en Afrique centrale, le CIFOR a été impliqué dans des démarches sous régionales de grande portée. La première démarche a été celle sur l’élaboration des normes de gestion durable des forêts en Afrique centrale. Ensuite, il y’a eu des recherches sur la gestion des produits forestiers non ligneux et les efforts d’analyse de la gouvernance forestière en Afrique centrale. Les forêts, il faut le dire, jouent un rôle très important dans l’économie. À titre d’exemple, au Gabon qui est un pays pétrolier, le secteur forestier représente le deuxième employeur après l’Etat.

En somme, la réputation du CIFOR, à l’échelle nationale et internationale, découle de l’intérêt conjoint de la communauté internationale et du centre pour les forêts du Bassin du Congo et de l’amélioration des conditions de vie des populations qui en dépendent.

COBAM news : Que signifie CARO qui accompagne généralement le sigle CIFOR et quel est le mandat du bureau régional du CIFOR ?

REA : CARO est un sigle anglais (Central Africa Regional Office) qui signifie bureau régional pour l’Afrique centrale. Ce bureau est installé à Yaoundé, mais a pour mandat de conduire toutes les recherches du CIFOR en Afrique centrale.

COBAM News : Quelle est la place de la lutte contre le changement climatique au CIFOR et au CARO ?

REA : De manière générale, la lutte contre le changement climatique est l’une des thématiques les plus importantes du CIFOR. Au niveau de l’Afrique centrale, ce volet comporte d’importants projets, donc le COBAM, qui est financé par la Banque africaine de développement et la CEEAC ; FORAFARMA qui est un projet financé par l’AFD (Agence française pour le développement) et le Fonds français pour l’environnement mondial ; GCS (Global Comparative Study on REDD+) et bien avant, CoFFCA par exemple, qui portait sur l’adaptation. La moitié au moins des travaux du CIFOR porte sur le changement climatique. La grandeur de ce portefeuille démontre l’importance de la lutte contre le changement climatique en Afrique centrale pour le CIFOR.

COBAM News : Parlons du COBAM : quelles sont ses spécificités, ses défis et ses perspectives ?

REA : Le COBAM essaie de trouver des synergies entre les stratégies d’adaptation et les stratégies d’atténuation au changement climatique dans le Bassin du Congo. A l’échelle mondiale, la communauté internationale sur l’atténuation. Pourtant, les populations de l’Afrique en général sont vulnérables aux effets du changement climatique. Le CIFOR aimerait attirer l’attention sur l’atténuation au niveau international et lier ces deux concepts de lutte contre le changement climatique. La mission du COBAM est d’autant plus grande et importante que le projet comporte un double volet : un volet recherche sur les politiques et sur les pratiques, et un volet développement capable d’influer les politiques de développement grâce aux résultats obtenus sur les sites pilotes.

Propos recueillis par Merline Touko

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